Situation sanitaire FCO-MHE et vaccination
Voici des précisions sur l'évolution de la situation sanitaire /maladies vectorielles touchant les élevages de ruminants et la prise en charge par l'Etat de la vaccination contre la FCO3 et la MHE.
En savoir +Climat et qualité de l'air
Dernière mise à jour le 13 décembre 2024
Le 19 novembre dernier, la Chambre d’Agriculture a organisé au Lycée Agricole des Sardières un forum sur le changement climatique. Serge Zaka, agro-climatologue, en était l’invité principal. Il a ouvert la journée par une conférence sur l’évolution climatique, ses impacts sur l’agriculture et les solutions pour s’adapter.
D’entrée de jeu, Serge Zaka annonce à l’assemblée qu’il est là pour parler d’opportunités et non de catastrophe ! Et il énonce sa conclusion qui est : ANTICIPER ! L’anticipation doit être le maître-mot de notre action. Il estime que nous avons les facultés scientifiques, techniques, économiques pour anticiper la situation, au moins jusqu’à une augmentation de la température moyenne de 3°C. Mais pour avoir la possibilité de le faire réellement, il faut que les moyens financiers et les priorités soient orientés de façon efficace.
Serge Zaka revient sur des définitions et décrypte quelques épisodes récents qui expliquent bien les phénomènes du changement climatique.
Tout d’abord, savoir de quoi on parle ! Il y a d’une part l’agrométéorologie, qui regarde l’impact de la météo sur l’agriculture. C’est ce que font tous les agriculteurs quotidiennement, en réagissant au coup par coup en fonction des prévisions météorologiques. C’est une approche sur le court terme. L’agroclimatologie étudie quant à elle l’impact du climat sur l’agriculture, en prenant en compte les évolutions passées et futures (projections) sur le long terme, et elle implique des décisions socio-économiques et politiques.
L’observation de ces dernières années montre bien quels sont les impacts déjà visibles du changement climatique. Par exemple, le gel de 2021 a causé 2 milliards d’euros de dégâts, un chiffre jamais atteint. Une masse d’air froid est descendue sur la France début avril. Le problème, c’est qu’elle a succédé à une période chaude. En mars, les températures ont atteint 30°C dans le Sud-Ouest, 25°C dans notre département. Le froid est donc arrivé sur une végétation très avancée, ce qui explique l’importance des dégâts. En 2022, nous avons vécu une sécheresse longue, et 3 épisodes de canicule. De grosses pertes de rendement ont été enregistrées en maïs et dans une moindre mesure en blé. Ensuite est arrivée une période de pluies abondantes, avec de gros cumuls en peu de temps. En 2024, nous sommes actuellement sur l’année la plus humide enregistrée au cours des dernières décennies.
Ces variations importantes d’une année sur l’autre ou même sur des durées plus courtes et de façon très marquée, sont compliquées à gérer pour les agriculteurs. Mais ce sera leur quotidien à l’avenir.
Le changement climatique ne se manifestera pas comme une sècheresse perpétuelle, mais plutôt comme une succession d’épisodes de nature variée, avec des phénomènes extrêmes marqués.
Après avoir posé ce cadre, Serge Zaka a détaillé les impacts du changement climatique sur les différentes productions, ainsi que les leviers d’adaptation et opportunités.
Pour l’élevage, un indice est directement corrélé au bien-être animal : le THI (Temperature Humidity Index), qui, comme son nom l’indique, combine température et humidité. Lorsque les 2 critères augmentent, l’animal sort de sa zone de confort pour subir un stress de plus en plus fort, pouvant aller jusqu’à la mort dans les cas les plus extrêmes (très chaud et très humide). A court terme, l’appétit est diminué, ainsi que la production laitière. A plus long terme (au-delà de 3 à 4 j de canicule), l’état général de l’animal est affecté (baisse de l’immunité, problèmes de reproduction, boiteries) et la qualité du lait diminue.
Les pistes d’adaptation pour l’élevage bovin sont multiples et à combiner entre elles :
Pour les volailles, l’augmentation du THI va provoquer une diminution de la croissance, des étouffements et de la mortalité. Il faut bien prendre en compte que les bâtiments jusqu’à maintenant sont prévus pour protéger les animaux du froid. Sans aménagements ou bonne gestion, ils peuvent devenir une étuve.
Les prairies auront une courbe de production décalée, avec un démarrage de la pousse plus tôt, une hausse de la production printanière, une accentuation du creux d’été et une reprise à l’automne favorisée par la douceur des températures et la teneur plus élevée en CO2, si les sols ne sont pas trop secs. Cela peut allonger les périodes de pâturage, à condition que la portance du sol le permette. L’impact sur la production globale de la prairie est plus difficile à évaluer. Si la pousse de printemps et d’automne sont bien valorisées, cela pourra compenser le creux d’été.
En conséquence, les périodes de réalisation des stocks de fourrage seront décalées, les espèces implantées devront évoluer vers des plantes plus résistantes à la chaleur et à la sécheresse pour maintenir une production en été. Une plus grande diversité des prairies peut permettre de mieux s’adapter aux différents phénomènes climatiques.
Il n’est pas impossible que dans les secteurs de plaine, l’élevage bovin devienne très compliqué voire impossible à l’échelle 2050. Une réorientation vers des animaux moins sensibles à la chaleur comme les caprins et les ovins peut être une piste. La zone de montagne gardera des conditions propices à l’élevage.
Le saisonnier d’aujourd’hui sera-t-il le saisonnier de demain ? Certainement pas ! Une des grandes caractéristiques du changement climatique est le décalage qu’il provoque dans les cycles de production.
Le changement climatique va donc jouer en même temps sur les notions de saisonnalité et de local. Les périodes de production des fruits et légumes « de saison » se décaleront et de nouvelles productions apparaîtront dans la gamme des productions locales. A Beaune, la date des vendanges a déjà avancé de 20 jours au cours des quarante dernières années, et cela va continuer.
Cela entrainera des modifications des aires géographiques de production. En ce qui concerne la tomate, dans les années 1970, les zones de production en plein champ ayant les meilleurs potentiels se situaient en Provence, en Italie ou encore en Espagne. En 2070, ces régions n’auront plus de potentiel de production en été, et notre région aura des conditions très favorables pour cette culture. Par contre, il ne sera pratiquement plus possible pour nous de cultiver des salades en été, lors que les côtes de la Manche vont voir leur potentiel de production augmenter. Ce territoire sera « La » grande zone maraîchère de France. Les périodes de semis et de production devront s’adapter aux évolutions climatiques.
La remontée du climat type méditerranéen au nord de Lyon va permettre de développer de la vigne sur de plus larges secteurs, d’avoir une production arboricole comme l’abricot dans la vallée de la Saône, ou encore cultiver des arachides (avec un potentiel de 80% de réussite à partir de 2040) ou voir plus régulièrement et avec de bons potentiels la patate douce ou le pois chiche. Bien entendu, le choix de ces productions devra toujours tenir compte des types de sol et pour certaines ne pourront se faire que s’il y a une ressource en eau disponible.
Pour certaines cultures, nous faisons déjà le constat d’une stagnation des rendements depuis plusieurs années (blé, maïs, colza, tournesol…). Le maïs grain disparaîtra du sud-ouest de la France tandis que l’agriculture russe va bénéficier du changement climatique…
Les moyens pour maintenir ces cultures avec une bonne rentabilité sont à plusieurs niveaux, et à combiner entre eux :
La rémunération des produits à leur juste valeur par des filières fortes, structurées.
La place des filières, en lien avec les choix politiques et l’orientation des moyens publics, est primordiale dans l’adaptation de l’agriculture au changement climatique. L’évolution vers de nouvelles productions ne pourra se faire en faisant peser tous les risques sur les agriculteurs seuls. Cette transition doit être accompagnée et même initiée par les pouvoirs publics et les opérateurs économiques.
Pour terminer sa conférence, Serge Zaka a abordé le sujet de la gestion de l’eau. La simplification des paysages au cours des dernières décennies n’a fait qu’accélérer la circulation de l’eau, qui ne reste plus sur le territoire où elle tombe.
Les OGM, les satellites, les grandes bassines sont-elles les seules solutions ? « Non, nous dit Serge Zaka, par une hydrologie régénérative, il est possible de modifier cette évolution ». Les 4 grands principes pour la gestion de l’eau sont : ralentir, répartir, infiltrer, stocker. On parle de « culture de l’eau ». Quand cela est possible, des aménagements du paysage peuvent être réalisés pour concourir à ces objectifs : modification du dessin des parcelles par rapport à la pente, création de fossés pour recueillir l’eau et permettre son infiltration, plantation de haies pour protéger du soleil et couper du vent… A l’échelle de la parcelle, d’autres pratiques vont contribuer à améliorer le microclimat. Par exemple, le maintien d’une couverture des sols permet de diminuer l’évaporation tout simplement parce que la couleur verte de la végétation absorbe moins la chaleur que la couleur marron d’une terre nue.
Article rédigé par Claire Baguet et Gilles Cauvin – Chambre d’Agriculture de l’Ain